Pas d’odeur, mais beaucoup de qualités !
Posted on 02. Jun, 2010 by Florent Baarsch in bits, France
L'argent pour l'adaptation, sujet de discussions et d'actions
Le groupe de contact (de négociations) sur le financement de l’adaptation au changement climatique vient juste de se finir. Deux sessions d’une heure et demi chacune ont permis aux parties d’exprimer leurs positions sur le nouveau texte présenté par Margareth Mukahanana-Sangarwe (ici, tout le monde l’appelle Margareth). L’une des questions qui a été discutée aujourd’hui par les délégués fut celle de savoir comment assurer que l’argent nécessaire à la mise en place d’actions dans les pays en développement soit suffisant, prévisible, nouveau et additionnel.
Aux Nations Unies, l’argent n’a pas d’odeur, mais il doit avoir un certain nombre de qualité pour être utile à l’adaptation aux changements climatiques. Petite explication sur les qualités à avoir pour passer le test onusien.
Suffisant : l’argent nécessaire pour l’adaptation au changement climatique doit répondre à une première exigence essentielle – être à la hauteur des besoins des pays en développement. Sans entrer dans la bataille des chiffres et des expertises, entre 67 (chiffre UNFCCC) et 150 (Oxfam, 2009) milliards de dollars sont nécessaires pour lutter contre les conséquences des modifications du climat.
Les débats concernant le montant à apporter n’ont pas encore débuté, mais d’après l’Accord de Copenhague, il est prévu que 100 milliards de dollars soient « mobilisés » pour rencontrer les besoins des pays du Sud.
Prévisible : les pays en développement craignent vraiment que l’argent versé le soit de manière irrégulière ou soumis à des aléas qu’ils ne maitrisent pas. Nombre de pays en développement s’inquiètent que le financement soit laissé entièrement au secteur privé ou aux marchés financiers (taxes assises sur les transactions sur le marché du carbone par exemple). Au cours de cette journée, les USA par la voix de J. Pershing ont annoncé que l’argent versé serait principalement issu du secteur privé avec les gouvernements comme catalyseurs. Reste plus qu’à connaître la définition de la catalyse financière public-privé !
Nouveau : il s’agit probablement là du point le plus dur des négociations. Les pays en développement et les ONG demandent instamment que cet argent soit réellement nouveau. Il ne s’agit pas de faire ce que le déjà regretté Yvo de Boer (secrétaire exécutif de la Convention) appelle du « climate washing ». Par « climate washing », Yvo de Boer entend le changement de nom de certains lignes budgétaires consacrées à l’aide publique au développement. Ainsi, et ce fut encore le cas des USA qui ont annoncé qu’ils allaient utiliser les fonds d’US-AID (l’agence pour le développement) pour l’adaptation au changement climatique. Du développement à l’adaptation, il n’y avait qu’un pas… Déjà allégrement franchi.
Additionnel : les fonds versés doivent, demandent certains pays en développement mais également la Norvège et les pays Scandinaves, être additionnels à l’aide au développement. Dans les années 1970-80, les pays développés s’étaient déjà engagés à verser 0,7% de leur PIB pour l’aide au développement, aujourd’hui, seules la Norvège, et la Suède ont rempli leurs engagement. Pas étonnant alors que les pays en développement soient méfiants… ! Ainsi, aujourd’hui toujours, ces derniers par l’intermédiaire de l’Egypte (représentant l’Afrique) et la Zambie (représentant les pays les moins avancés) ont demandé à ce que les pays développés consacrent au moins 1,5% de leur PIB à l’adaptation au changement climatique. La stratégie du « demander beaucoup pour avoir un minimum » semble être encore dans les cartons de l’absence de confiance.
Tout ici n’est qu’une question de confiance, celle-ci fait défaut depuis quelques années déjà. Les financements prévus à Copenhague doivent être versés et un peu de confiance, nécessaire à l’avancée des discussions, sera retrouvé.