L’Arctique à Durban, un canari “schizophrène” dans la mine de charbon
Bien qu’elle ait eu lieu à l’opposé de la planète, la conférence de Durban (COP17) aura été l’un des plus important événement de l’année concernant l’avenir de l’Arctique.
Étant donné que la région se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète, le résultat de ces négociations a donc un impact particulièrement élevé sur l’environnement du Grand Nord et les communautés locales.
L’Arctique demeure un des symboles du changement climatique, les photos d’ours polaires et de la banquise se fissurant restant deux des images les plus utilisées pour illustrer le phénomène. Malgré le rôle que cette région joue comme «canari dans la mine de charbon», l’arctique n’a pas été l’objet de beaucoup d’attention dans les négociations internationales sur le climat.
Par le passé, le cas de l’Arctique a été évoqué lors de ces négociations principalement sous deux angles différents. Premièrement, la région est le sujet d’études scientifiques pour mieux comprendre l’évolution du climat dans le grand nord. D’importants rapports scientifiques commandités par le Conseil Arctique, comme l’ «Arctic Climate Impact Assessment» (Évaluation de l’impact du changement climatique dans l’Arctique), a accru la visibilité au sein de la communauté internationale sur l’importance de la région dans la régulation des courants marins et atmosphériques.
La présence lors de ces conférences onusiennes de représentants des peuples autochtones a aussi permis de donner des exemples plus concrets de l’impact du réchauffement de l’atmosphère sur le mode de vie de populations locales. Le projet « Many Strong Voices » établit par exemple un lien entre ces impacts sur les communautés des petits États insulaires et ceux les peuples autochtones de l’Arctique. Cette année, deux jeunes sont venus du Nunavut, la province septentrionale du Canada, afin de partager une perspective inuit sur le changement climatique.
À Durban, la Suède a organisé un événement au cours de laquelle les impacts du changement climatique dans l’Arctique ont discuté. Pendant ce débat, M. Anders, secrétaire d’état Suédois, a lu une déclaration de Carl Bildt, ministre suédois des Affaires étrangères et président du Conseil de l’Arctique, exhortant «tous les pays à prendre des mesures décisives, tout en reconnaissant que des réductions importantes des émissions mondiales de gaz à effet de serre sont nécessaires selon la science afin de limiter l’augmentation de la température moyenne mondiale inférieure à 2 C au-dessus des niveaux préindustriels». Cet appel fait écho à la Déclaration de Nuuk, adoptée par le Conseil de l’Arctique en mai, dans lequel les huit États arctiques “exhortent” pour la première fois d’autres nations à prendre des mesures urgentes afin d’atténuer le changement climatique.
Jens B Fredriksen, vice-Premier ministre du Groenland, a également participé à ce panel en soulignant les défis auquel le Groenland est confronté en raison des changements climatiques, ainsi que les opportunités économiques potentielles qui pourraient en découler pour le Groenland.
Malgré l’engagement commun exprimé par chacun de ces huit États arctiques dans la Déclaration de Nuuk, leurs délégations gouvernementales ont joué des rôles très différents lors de la conférence de Durban. On se souviendra de la participation de la Norvège sur la base de la déclaration passionnée d’Erik Solheim, ministre norvègien de l’environnement et du développement international, lors de la dernière nuit de négociations. Erik Solheim appela à rapprocher les intérêts de certains pays développés (tel l’UE) pour une futur instrument juridiquement contraignant et le plaidoyer pour l’équité par certains pays en développement (Inde en tête) afin de parvenir à un compromis.
(Intervention d’Erik Solheim, en anglais)
De manière diamétralement opposée, les Etats-Unis et le Canada ont émergé de la conférence comme deux des principaux obstacles sur la voie d’un cadre juridique renforcé pour la réduction des émissions à effet de serre. La décision unilatérale du Canada de se retirer du Protocole de Kyoto constitue peut-être le coup le plus important porté lors de la dernière décennie à la coopération internationale sur le climat.Les résultats de la conférence de Durban constituent un petit pas vers un nouvel accord international pour lutter contre le changement climatique. Néanmoins, la COP17 n’a rien fait pour résoudre le problème de l’énorme fossé existant entre les promesses de politiques nationales de réduction des émissions et l’objectif convenu de limiter l’augmentation moyenne des températures à deux degrés. Considérant que l’Arctique se réchauffe plus vite que le reste de la planète, ce faible niveau d’engagement signifie que la région se dirige vers des bouleversements physiques radicaux. Dans ce contexte, on ne peut que regretter que le consensus affirmé entre les huit États arctiques dans la Déclaration de Nuuk n’aie pas empêché certains d’entre eux de prendre des positions opposées à Durban.Photos: Arviat History Project et Sébastien Duyck




About the author
Sébastien DuyckPassionate environmental advocate, PhD student (Human Rights and Environmental Governance). Following particularly UNFCCC, UNEP and Rio+20 processes