10 jours à Rio: derniers préparatifs avant le sommet de la terre
Cette semaine, le dernier chapitre des négociations préparant la conférence Rio+20 s’ouvre à Rio. Pendant trois jours, les négociateurs représentant près de 200 pays vont s’efforcer de donner une dernière touche au texte sur lequel il travaille depuis plusieurs mois. L’objectif est de préparer le terrain avant l’arrivé à Rio des chefs d’états et de gouvernements qui auront pour mission d’adopter une déclaration consensuelle la semaine prochaine.
Deux ans de préparations avant d’atteindre Rio
Si la conférence de Rio proprement dite ne durera que trois jours à la fin du mois, c’est qu’elle ne sera que le sommet de l’iceberg : le processus Rio+20, c’est déjà près de deux années de discussions et 6 mois de pourparlers plus intensifs à New York. Contrairement à la conférence de Rio qui eut lieu en 1992, il n’est pas question cette fois-ci d’adopter de grande convention sous l’égide des Nations Unies (on se rappellera que Rio 1992 avait accouché des conventions sur le climat, sur la biodiversité et sur la désertification). Dans un contexte très peu propice à l’adoption de nouveaux traités internationaux, l’heure est plus aux réformes de ce qui existe déjà et à la mobilisation des acteurs économiques dans une transition vers une économie plus « verte ».
Développement ou Environnement, ou peut-être les deux?
La question du cadre de cette conférence est importante. Historiquement, le rayon d’action des sommets de la terre a évolué depuis la conférence onusienne de Stockholm en 1972 consacrée à l’”environnement humain” et jusqu’au sommet de Johannesburg portant sur le développement durable. Ce changement de terminologie souligne l’intérêt croissant pour les questions sociales et économiques au sein de ces grands rendez-vous. Cette année, ce sera donc encore le développement durable qui sera à l’honneur, soulignant donc que les politiques environnementales ne peuvent se faire sans considérer leurs dimensions sociales et économiques.
Interrogé sur ce sujet, Achim Steiner, le directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l’Environnement, a renvoyé lundi les états face à leurs responsabilités. Certains pays, parmi lesquels l’Inde, ont une position très marquée rejetant toute focalisation sur la question environnementale, l’Inde arguant que cela risquerait de “donner un poids disproportionné à la dimension environnementale du développement durable”. Lors d’une visite impromptue au Youth Blast - conférence de la jeunesse organisée sur place pour préparer Rio+20, Mr. Steiner a proposé que les pays exprimant ces doutes apportent les preuves qu’un travail plus cohérent des nations unies sur la question environnementale aurait en effet des conséquences sur le développement des pays émergents, ou bien que ces pays “se fassent une raison et se taisent”.
Ce débat sur l’importance du volet environnemental ne se retrouve pas que dans les discussions portant sur les réformes institutionnelles au sein des Nations Unies. Le deuxième thème de la conférence sonne déjà comme un compromis: économie verte dans le contexte du développement durable et de l’éradication de la pauvreté. Malgré cette formulation plutôt prudente, de nombreux pays continue de contester le terme même d’économie verte. Relevant ces tensions, le négociateur en chef de l’Union Européenne, Timo Mäkelä, indiquait aujourd’hui qu’il restait énormément à faire afin de réconcilier l’économie avec les autres aspects du développement durable, les thématiques sociale et environnementale étant de mieux en mieux intégrées.
Et maintenant?
Lors de son court passage mardi à la conférence de la jeunesse, Sha Zukang, numéro deux des Nations Unies et secrétaire général de la conférence, a lancé une recommandation en forme de défi aux jeunes préparant le sommet. “Si les négociateurs échouent lors de la conférence de Rio Plus 20, je ne pense pas que vous devriez les laisser quitter le centre de conférence.” Un appel à la résistance peu commun dans le monde onusien mais qui écho les appels du pied insistants ces derniers temps de la part des représentants des Nations Unies qui s’inquiètent de plus en plus du manque d’intérêt de la société civile pour le sommet.
La conférence risquerait-elle donc de se conclure par un échec retentissant ? Si l’on prend en compte la diversité des sujets discutés à Rio (des plus consensuels au plus polémiques), il y a fort à parier que la conférence se conclura sur un bilan en demi-teinte, avec un résultat certes plus positif que lors de la conférence de Copenhague, mais bien loin des attentes de la société civile.
Tout l’enjeu des prochains 10 jours sera donc de savoir de quel extrême le résultat de la conférence se rapprochera le plus.




About the author
Sébastien DuyckPassionate environmental advocate, PhD student (Human Rights and Environmental Governance). Following particularly UNFCCC, UNEP and Rio+20 processes